vendredi 2 avril 2010

]Humeur] _ décevante // Siddhartha de Angelin Preljocaj // Opéra Bastille // 31 mars 2010

Je me souviens de Siddharta (de Hermann Hesse), comme d’un de ces moments de lecture qui marque. Sans doute parce que tout un chacun s’est posé ou se pose, un jour où l’autre, la question de la difficulté de comprendre la vie, de trouver un sens à tout cela, de trouver la paix dans le tumulte, d’atteindre la sagesse et le détachement. Je me souviens de Siddharta comme d’un jeune homme qui a beaucoup essayé, qui ne s‘est pas privé de vivre, qui s’est même égaré dans le tourbillon incessant des expériences de l’existence jusqu’à sa rencontre avec une rivière, avec un passeur qui l’ont fait s’arrêter, qui lui ont offert le temps de la contemplation et de la compréhension, qui lui ont permis, pour la première fois, ne pas rester extérieur au monde, mais de s’unir à lui pour mieux l’entendre. Je connais moins bien Siddharta Gautama, qui ouvrira la voie au bouddhisme. Peut-être est-ce là que le bât blesse ?

Comment me souviendrais-je du Siddharta de Angelin Preljocaj ? Sans doute, comme d’une grande déception, à moins que je ne m’en souvienne plus vraiment. C’est la première fois que j’assistais à une chorégraphie de Angelin Preljocaj ; je n’ai donc pas de recul sur son style, je ne peux pas dire si ce ballet est représentatif de sa « patte ». Mais je ne le crois pas.
Dans tous les cas, je suis passée à côté de l’histoire sans parvenir à identifier les épisodes qui se jouaient sur scène. Etait-ce la vie de Siddharta ? Cela aurait pu tout aussi bien être celle d’un autre grand mythe ! Je suis restée extérieure à cette danse, aux références classiques trop appuyées, à l’écriture un peu « brouillonne ». Certes, il fallait faire avec le ballet de l’Opéra de Paris pour honorer cette commande « surdimensionnée ». Il était donc plus facile de tomber dans le Lac des Cygnes que dans le Mahâbhârata. Mais pourtant, un exercice sous contrainte n’empêche pas de faire montre d’inspiration, d’un soupçon d’inventivité ou d’une étincelle de folie. Hélas , ces « ingrédients » ne font pas partie de la recette créative de ce spectacle indigeste. Les décors (Claude Lévêque) grandiloquents tombent parfois à propos mais renvoient le plus souvent à une thématique obscure. La musique contemporaine (Bruno Mantovani) peu subtile, à force de percussions, de tambours et d’emphases permanentes, n’offre pas de répit.

Que reste-t-il ? Quelques moments de grâce, durant lesquels l’énorme boule encensoir de l’ouverture dispense sur le monde, inexorablement, sa désolation grise, l’apparition irradiante de l’Eveil (Aurélie Dupont), auréolé d’un temple, inonde Siddharta de lumière pour mieux lui montrer la voie de l’Illumination mais dans le même temps éclipse Siddharta, le danseur, l’hypnotise jusqu’à lui faire oublier sa danse.

La spiritualité n’est pas à la portée de tous. Il semble qu’Angelin Preljocaj, ce chorégraphe « de la chair » comme le décrivent certains journalistes, en ait fait les frais à ses dépens.

Source photo : site le Monde

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